Mon intervention en Conseil municipal sur les transports en commun
Lors du Conseil municipal du 10 mars 2017, je suis intervenu afin de défendre ma position concernant les transports en commun à travers notre avis sur le Plan de Développement Urbain. Retrouvez ici mon intervention.
Monsieur le Maire,
Cher(e)s collègues,
Je voudrais commencer par souligner l’importance de cette délibération qui nous permet d’aborder en ce lieu la question fondamentale des transports en commun, enjeu majeur pour notre ville et notre agglomération.
Nous pouvons tous je l'espère, élus de la majorité comme de l'opposition, nous retrouver autour d’un même constat : la réalité que vivent chaque jour ou, plus justement, devrais-je dire la réalité que subissent chaque jour les Toulousaines et les Toulousains n’est plus acceptable.
Cette réalité, s’il est encore utile de la décrire, ce sont des encombrements déjà sans fin qui semblent pourtant s’allonger au fil des jours en même temps que la qualité de vie des habitants se détériore. Cette situation, nous voulons l’exprimer clairement ici devant vous, ne saurait être imputable à un seul bord politique et il serait aussi inaudible que vain d’enfermer le sujet et ses enjeux dans de stériles querelles partisanes.
La question des transports en commun dans notre ville nous oblige ainsi, en tant qu’élus aujourd'hui en responsabilités et garants du devenir de Toulouse, à mener sereinement nos débats avec pour seul et unique dessein d'oeuvrer pour l’amélioration de la mobilité, d’oeuvrer pour offrir à nos concitoyens la fluidité et le confort optimaux dans leurs déplacements, tout en prenant efficacement en considération les préoccupations environnementales notamment la lutte contre la pollution. Le défi est immense au regard de la situation actuelle et nous devons le relever avec détermination mais aussi avec l'humilité nécessaire à la compréhension et à la résolution de problématiques complexes.
Ainsi, vous l’aurez compris, c’est départis de tout préjugé, c’est sans aucune certitude quant à l'orientation de notre vote que nous avons pris connaissance de cette délibération. Seule l’analyse attentive des propositions contenues à l’heure actuelle dans le Plan de Déplacement Urbain a guidé notre position, position que je souhaite exposer et défendre aujourd'hui.
Le souhait émis en préambule de nous voir partager ensemble un même constat, mais surtout une même ambition pour l’avenir de notre ville a trouvé une part de sa concrétisation au sein du projet pour la mobilité de notre agglomération à travers un certain nombre de propositions qui nous semblent aller véritablement dans le bon sens.
Pour illustrer mon propos, je souhaiterai citer le doublement des rames du métro de la ligne A qui permettra d’éviter sa saturation, projet que nous avions initié.
J’évoquerai également le téléphérique urbain sud que nous avions imaginé et que vous allez mettre en action.
Ces projets Monsieur le Maire, chers collègues sont tout à fait pertinents et c’est en toute cohérence que nous les soutenons et que nous les soutiendrons.
J’évoquerai aussi la création de dix lignes de bus linéo. Là encore, nous avions lancé la première ligne et conçu le déploiement des 9 suivantes que vous avez donc décidé de réaliser et nous ne pouvons que nous féliciter de ce choix qui profite je le crois à l’intérêt général.
Je l’ai dit, nous avons abordé cette lecture sans aucun a priori, sans aucune évidence et après avoir pris connaissance des différents projets que je viens d’énoncer, si a priori il devait y avoir il était alors plutôt favorable. Dès lors, la déconvenue qui s'en est suivie n'en a été que plus grande, une déconvenue peut être tout aussi importante que la communication que vous avez déployée en matière de transports en commun laissant alors penser que vous aviez véritablement pris la mesure de la gravité de la situation de notre agglomération.
Et qui dit gravité, dit urgence Monsieur le Maire, urgence à agir, urgence à réagir afin d’enrayer au plus vite une situation qui s'enferre dans une spirale dont les Toulousains pensent qu’ils ne verront jamais la fin.
Par-delà donc les avancées que je viens d’évoquer, vous l’aurez compris il est déjà l’heure d'esquisser les écueils auxquels se heurte selon nous ce Plan de Déplacement Urbain.
Ces écueils, Monsieur le Maire, chers collègues, sont de différentes natures, 3 pour être exact. 3 categories de problèmes qui appelent chacun des réserves de notre part et dont le cumul nous oblige à exprimer ici une véritable déception. Je vais tacher de vous les exposer avec la plus grande clarté possible et dans un esprit constructif qui, je l'espère, saura susciter chez vous une propension a l’autocritique jusqu'ici rarement dévoilée.
En premier lieu, nous voulons dénoncer un sérieux problème de méthode.
Le conseil syndical de Tisséo a choisi d’arrêter sa première proposition dès le mois d’octobre dernier sans attendre les conclusions du débat public organisé, sur la troisième ligne de métro.
En agissant ainsi, vous avez empêché les citoyens, les usagers quotidiens du réseau de transports, les usagers quotidiens des routes et de la rocade, mais aussi les associations qui les représentent et portent leur voix, de contribuer efficacement à l’amélioration de votre projet, de ce projet qui a vocation a transformer leur cadre de vie si telle en est bien toujours l’ambition.
De fait, cette façon de faire a purement et simplement privé les Toulousains d’un large débat sur l’ensemble des solutions et des alternatives qui permettraient de développer et d’améliorer l’efficience des transports en commun. Des solutions, des propositions, des idées qui permettraient d’optimiser leurs déplacements et de répondre aux enjeux de santé liés à la qualité de l’air. En agissant ainsi, en ignorant les avis et conclusions de la Commission Nationale du Débat Public, vous faites le choix de tourner le dos à une réalité de plus en plus prégnante, une réalité qu’il est pourtant heureux de voir émerger dans notre ville et dans notre pays, je veux bien entendu parler de la volonté des citoyens d’être écoutés, d’être entendus au travers des consultations et qui n’hésitent pas lorsque la faculté leur en est offerte à donner leur avis, à formuler leurs propositions et parfois même à construire avec les élus les grandes décisions dont ils sont par ailleurs et cela ne vous aura pas échappé les principaux intéressés.
Le temps où la politique se décidait sous les lumières feutrées des Palais de la République est aujourd’hui révolu. Personne ne connait mieux la problématique des transports en commun que celles et ceux qui doivent la vivre, la subir, au quotidien.
Qu’il nous soit donc ici permis de vous dire que vous auriez dû attendre la fin du débat public pour faire délibérer le Conseil Syndical, car il s'agissait là d’une question de respect tout autant que d’efficacité. Vous me permettrez encore de citer les observations de la Commission Nationale du Débat Public, que nul ne saurait accuser d’être partisane et qui parle, rejoignant notre analyse, d’un « calendrier des concertations difficile à comprendre" ajoutant que « le débat public sur le projet de 3e ligne s’est inscrit dans un ensemble plus large de projets et procédures impliquant des concertations pour la population.
À l’occasion d’un conseil syndical du 4 février 2015, le SMTC-Tisséo a délibéré de manière concomitante sur la révision du PDU et sur le lancement des études sur le projet de 3e ligne. Puis, le 19 octobre 2016, le SMTC-Tisséo a arrêté le projet de PDU, dont la 3e ligne est un élément majeur, en ce que cette dernière concentre près de 60 % du budget du nouveau PDU. De nombreux participants au débat ont regretté ce timing. »
Dans cette même optique, à l'instar de la commission nationale du débat public, nous formulons le souhait que « les modalités de cette concertation, le moment choisi pour l’enquête publique et sa durée permettent une large participation. » et nous appelons encore de nos voeux une concertation exemplaire, à la hauteur de la volonté d’implication des Toulousains dans les projets qui les concernent.
Reprenant là encore les recommandations de la commission nationale nous ne souhaitons pas que "le partenariat soit limité aux milieux économiques » et il conviendra donc de l’ouvrir aux associations et groupements qui se sont montrés actifs et propositionnels pendant le débat public, en particulier les associations et les syndicats de salariés. ».
J’ajoute ici que le partage des données sera fondamental en ce domaine afin de permettre à chacun de se forger une opinion, de promouvoir la transparence et la mise en commun des intelligences.
En second lieu, nous voulons dénoncer l’absence de plan d’urgence face à une problématique dont la gravite est exponentielle.
Je l’indiquais en introduction trop de Toulousains sont confrontés chaque jour à des difficultés majeures dans leurs déplacements. Comment pouvez-vous sérieusement envisager d’attendre l’arrivée de la troisième ligne de métro d’ici 8 à 12 ans pour leur apporter une réponse ? Je le dis, nous ne sommes pas hostiles au projet d’une nouvelle ligne de métro, nous formulons en revanche une exigence : la priorité donnée au projet de 3eme ligne ne peut et ne doit pas l’être au détriment de tout autre nouveau projet significatif, permettant de réduire l’usage de la voiture et de développer les transports collectifs ou les modes de transports alternatifs. Différents scenarios permettant d’établir un vrai plan d’urgence bien plus large que la troisième ligne de métro existaient : prolongement immédiat de la ligne B jusqu’à Labège, prolongement du tramway jusqu’à la gare, lancement sans tergiversation du projet de téléphérique urbain, vous disposiez de solutions, d’options que vous avez pourtant reléguées au rang des accessoires pour ne porter qu’un seul projet d’envergure là où notre agglomération a besoin d’une pluralité de solutions.
En troisième et dernier lieu, nous voulons ici faire part de nos doutes quant à votre capacité à financer le plan proposé sans nouvelle augmentation massive des impôts.
En effet mobilisant près des deux tiers des investissements prévus pour le seul projet métro, après 2020, sur des hypothèses de financements, de recettes et de dépenses hasardeuses et aléatoires, la soutenabilité financière de ce PDU est de facto fortement sujette à caution.
Sur le point du financement, les Toulousains qui ont répondu aux questionnaires de la commission rejoignent notre analyse et sont 66 % à ne pas savoir si le coût annoncé est réaliste ou à penser qu’il ne l’est pas, et 57% à douter ou à ne pas savoir si nous aurons les moyens de financer un tel plan.
Monsieur le Maire, Mesdames Messieurs les élus de la majorité, disons-nous les choses honnêtement les Toulousains ne supporteraient pas de subir une nouvelle hausse massive des impôts après l’augmentation de 15% que vous avez décidé pour la ville de Toulouse, mais également pour la métropole et qui a considérablement obéré le pouvoir d’achat des Toulousains.
Monsieur le Maire, vous avez face à vous une opposition mue par la seule volonté d’améliorer les conditions de vie des Toulousains et qui étudie à la lumière de ce seul objectif vos propositions sur l’ensemble des sujets et singulièrement sur la question des transports en commun.
Des avancées existent dans ce Plan de Déplacement Urbain et je les ai saluées. Mais les erreurs de méthode commises tout comme les nombreuses incertitudes qui demeurent quant à son efficacité immédiate et à son financement forgent notre conviction qu’il n’est pas à hauteur des enjeux de notre temps, des enjeux de notre ville. Soucieux d’accompagner les évolutions positives esquissées dans ce plan, soucieux de ne pas entraver les améliorations qui seront tout de même engagées grâce à sa mise en oeuvre en dépit d’une absence véritable d'ambition suffisante, Monsieur Briançon, Carreiras, Mesdames Ramos, Touchefeu et moi-même nous abstiendrons.
Romain Cujives
Conseiller municipal de Toulouse
Conseiller communautaire de Toulouse Métropole