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CONSEILLER MUNICIPAL DE TOULOUSE ET CONSEILLER COMMUNAUTAIRE DE TOULOUSE MÉTROPOLE

Des gilets jaunes pour chasser les idées noires

Il serait plus facile et moins risqué de se taire comme tant d'autres. On ne peut pourtant se draper dans un confortable silence lorsque l'on voit une partie du peuple de France prendre la parole avec tant de force.

 

L’alerte sonne depuis trente ans. De Christopher Lasch hier à Christophe Guilluy aujourd’hui en passant par Thomas Piketty, nombreux sont les écrivains, sociologues, géographes à nous parler de ceux que d’autres voudraient oublier. Ceux qui galèrent alors qu’ils n’aspirent souvent qu’à pouvoir vivre dignement. La majorité si longtemps silencieuse et qui a aujourd’hui décidé de se parer d’un jaune fluorescent pour montrer qu’elle est là, qu’elle a encore faim d’exister et qu’elle est décidée à se battre pour que l’on cesse de la marginaliser.

Que demandent les gilets jaunes ? Le gouvernement semble ne pas comprendre. Pourtant, ne voit-il pas dans cette révolte un rappel assourdissant à la devise de la République ?


La liberté d’abord. Celle de pouvoir se rendre à son travail sans se ruiner. Celle de pouvoir circuler pour visiter sa famille, ses amis, pour ne pas être assigné à résidence lorsque l’ont vit loin des centres villes des métropoles. Et surtout la liberté de ne pas avoir à choisir entre un trajet de 50 km et l’achat d’un morceau de viande ou d’un cadeau de Noël pour ses enfants.

L’égalité ensuite. Emmanuel Macron a-t-il oublié que la grande Révolution était née en grande partie comme une réaction à l’injustice fiscale ? Comment expliquer aujourd’hui aux français qui touchent le SMIC que leur essence sera surtaxée pour raisons écologiques quand on continue à laisser le kérosène libre de toutes taxes ? La mobilité des riches serait-elle moins polluante que celle des classes populaires et moyennes ? Evidemment non, bien au contraire.

Comment faire accepter une baisse de 5 euros des APL aux plus modestes lorsque dans le même temps, on multiplie les cadeaux fiscaux aux traders londoniens qui viendront s’installer à Paris ?

Après 18 mois de pouvoir à peine, les gilets jaunes s’insurgent pour rappeler au Président de la République ce qui devrait pourtant être une évidence : en France, on ne gouverne pas en faveur des 1% les plus riches au détriment des autres 99%. Et en France, on ne fait pas payer aux classes populaires et moyennes l’enrichissement frénétique d’une infime minorité.


La fraternité enfin. Ce mouvement citoyen n’est-il pas aussi un appel à « refaire société » ? Bien qu’ayant été attaquée, oubliée, méprisée, parfois stigmatisée pendant 30 ans, une partie du peuple français est bien décidée à ne pas se résigner à l’existence de ces « deux France » : la France des privilégiés et celle des autres. « Laissez-nous aussi participer au destin de notre pays ! » : c’est ce qu’en creux, beaucoup de gilets jaunes nous crient.


Le gouvernement semble incapable de répondre à cette révolte aussi soudaine qu’inévitable. Au lieu de revoir en profondeur sa politique pour y ajouter la justice dont elle manque tant, il reste engoncé dans son mépris habituel tout en pariant cyniquement sur un pourrissement du mouvement par les casseurs.
Bien sur, la transition écologique est urgente et indispensable. Elle implique un changement de nos modes de vie sans précédent. Comme toute transformation de cette ampleur, elle ne pourra être menée avec succès que si elle est acceptée par tous les français. Elle ne peut prendre la forme de mesures hypocrites, annoncées comme « écologiques » alors qu’elles ne visent en réalité qu’à compenser des cadeaux fiscaux offerts à ceux qui n’en ont jamais eu besoin.

La défense du rôle de l’impôt, des mécanisme de solidarité devra toujours suivre la dénonciation des injustices actuelles. Il s’agit de s’attaquer à la refonte pour les rendre plus fort parce que plus efficace, certainement pas de les faire disparaître puisque ce n'est pas l'impôt en lui-même qui est ici dénoncé mais ce qu’il est devenu : un mécanisme injuste.

À ceux qui se mobilisent je veux dire que vous menez avec dignité, détermination, un juste combat.

Jamais je ne vous ferai l’affront honteux de vous confondre avec les casseurs qui se mêlent à tous les rassemblements que la France connaît et pour lesquels je n’ai ni considération, ni pardon.


Je veux vous dire aussi que je ne prétendrai jamais porter votre voix, mais sachez que comme vous, je ne me résigne pas.

Romain Cujives
Conseiller municipal de Toulouse
Conseiller communautaire de la métropole